Entrepôt à textes

Le souvenir a le même pouvoir que l'écriture. (Amélie Nothomb)

Mardi 19 février 2008

Evocation rendue le 1.02.08

 

"L’absence est une ride du souvenir. C’est la douceur d’une caresse, un petit poème oublié sur la table."

 (T. Ben Jelloun)

Assise sur le rebord de la fenêtre ouverte, en cette fin d’après-midi d’automne, je sens le souffle frais du vent qui frôle ma joue, me rappelant la caresse hésitante d’un amant timide.

Je le regarde entraîner les feuilles mortes dans une ronde, les faire virevolter, autour du vieux chêne du jardin, seul témoin inébranlable de ma vie, pilier solide aux pieds duquel je suis libre de construire d’éphémères cabanes, que je dois ensuite accepter de voir plier sous la pression, parfois légèrement trop forte, des intempéries.

La danse aérienne de ces feuilles aux couleurs chatoyantes ravive en moi l’agréable souvenir de nos chaudes soirées d’été où nous parlions, jusqu’à une heure avancée, à la lueur dorée des flammes des bougies, et remplit mon cœur d’une tendresse à peine teintée d’une douce tristesse.

Je ferme les yeux, un instant, et me laisse emporter par la vague des images de ce temps désormais révolu, que j’oublie parfois, mais auquel je repenserai toujours avec joie.

Les coins de ma bouche se soulèvent, dressant l’ébauche d’un sourire serein sur mon visage, et soulignant les sillons, signes de sagesse, que la vie a creusés sur mon front.

Sur l’étagère, glissé entre deux pages de l’album photo, repose le dernier vestige de l’ancienne fusion de nos âmes, aujourd’hui désunies : les ultimes paroles que tu m’avais adressées, sous la jolie forme d’un petit poème d’au revoir, de nombreuses années auparavant, en ce matin printanier où le soleil peinait à percer l’épaisseur des nuages, mais où les fleurs embaumaient l’atmosphère de leur délicat parfum et où les oiseaux la réchauffaient de leurs mélopées enjouées.

Dehors, la brise légère est retombée, permettant aux feuilles de retrouver tranquillement leur place sur le sol. A leur image, mes souvenirs regagnent, peu à peu, leur emplacement dans l’épais volume de ma mémoire.

Une fois cet imposant recueil réorganisé, je le saisis de mes mains, encore imperceptiblement tremblantes d’émotion, et le range à côté des autres ouvrages qui composent ma vie et l’alimentent.

Mon cœur est paisible, mon visage radieux. Je ressens un sentiment de bien être que plus rien ne perturbe. Je sais que je peux désormais songer au passé avec sérénité, n’éprouvant plus que l’once d’une mélancolie ayant la délicatesse de l’affectueuse main qui effleurait ma peau de ses fins doigts gantés de la plus douce des soies...

  Aude Awa

Par Audawa - 1 commentaire(s)le 19 février 2008
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